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Remue Méninge
25 décembre 2007

Le repas de Noël

Les convives arrivent joyeux, les bras chargés de cadeaux, ils ont affronté le froid glacial de l’hiver, pour arriver dans la chaleur orangée de la pièce illuminée.

Cette année leurs hôtes ont fait des efforts de décoration, les bougies parfumées éclairent délicatement la pièce principale et elles seront fort appréciées quand l’oncle Albert fumera ses infâmes cigares.

Après les congratulations obligatoires, les moqueries à propos de tata Berthe qui a le nez qui coule et qui se mouche dans la serviette de table ou de cousine Gertrude toujours célibataire à 42 ans, la maîtresse de maison va chercher les huîtres que le cousin Régis vient d’ouvrir.

Les invités se jettent sur le plat, il est 22h42 il est temps de manger et d’éponger un peu l’infâme punch servit en apéro.

C’est Berthe qui la première remarque sur le visage de Gertrude un horrible bouton.
« Oh une perle » s’écrie t-elle en désignant la boursouflure.
Gertrude de mauvais poil, ce qui n’est en rien un jeu de maux sur la pilosité qui recouvre son visage depuis son adolescence, rétorque aussitôt : « Toi aussi Tata, il vient de t’en pousser un sur le nez ! »
Et toute cette joyeuse famille, rigole à tour de rôle, de cet étrange phénomène.
« Ahahaha, on retombe à l’adolescence, regardez on se couvre d’acné » se marre Régis.

La maîtresse de maison, un peu honteuse s’interroge sur la fraîcheur des huîtres, rappelant à la tablée que cela ne fait que trois semaines qu’elles séjournent sur le balcon, et que l’odeur fétide est plutôt signe de bonne santé.

Mais ce petit incident ne peut gâcher la bonne humeur de ce jour de fête.

Le maître de maison après avoir bien sûr aidé sa femme à débarrasser la table, ramène la marmite en fonte.
Il en soulève le couvercle et jaillit tel un clown d’une boite de farce et attrape, une poule fort fâchée qui saute d’assiette en assiette secouant la tête apeurée devant les regards amusés de l’assistance.

« Oh une poule » s’écrit Gertrude la fourchette levée. « Quelle bonne idée !».
« Mais tu aurais pu au moins la plumer » s’énerve oncle Albert.
La maîtresse de maison, haussant des épaules d’un air hautain lui fit remarquer qu’il est bien plus drôle de le faire soi-même, et que les plumes peuvent se révéler très pratiques pour attraper la poule.
Venant au secours de sa femme, le maître de maison propose sans plus attendre que tout le monde s’équipe de son couteau à dent et de sa fourchette en plastique pour courir après le volatile afin d’en découper chacun la part qui lui convient.

C’est Régis le plus chanceux qui brandit la première cuisse arrachée. Evidemment la malchanceuse Gertrude devra se contenter du blanc, tandis que la maîtresse de maison se régalera de la carcasse comme à son habitude.

Le taciturne Albert fait bien sûr remarquer qu’il pourrait y avoir des marrons, mais avant que sa mauvaise humeur déteigne sur le reste de l’assemblée, cousine Berthe suggère d’aller en chercher sur le marronnier de la place du village.

De retour à la maison, un concours de celui qui mangera le plus de châtaignes avec la bogue est lancé par Régis le rigolo. C’est Berthe qui gagne, quelle gourmande celle-la, on comprend mieux pourquoi malgré des régimes à répétition elle dépasse toujours les 142 kilos.

Le moment le plus attendu de la soirée arrive enfin quand la maîtresse de maison annonce qu’elle va dans la cuisine chercher la bûche de Noël. Elle revient rapidement sous les applaudissements de Berthe la gourmande, avec dressée sur un plat une belle bûche fraîchement débitée.
« C’est oncle Albert qui l’a sciée cet après-midi » s’exclame t-elle.

Tata Gertrude, visiblement gênée ne peut s’empêcher de remarquer qu’elle ne comprendra jamais les traditions, si elle trouve la résine agréable et fondante, elle n’admettra jamais qu’on puisse apprécier les fibres du bois qui restent coincées entre les dents.

Oncle Albert, déçu de ce comportement, la bienséance voulant que l’on ne se plaigne pas en ce jour de fête, dans son empressement à servir la famille découpe un bout de doigt de la cousine Gertrude. Cette dernière montrant une éducation sans faille, ne se plaignit même pas et plaisanta sur la couleur du sang coulis de framboise. Du coup tout le monde se prêta au jeu de la scie qui dérape.

C’est sur des derniers éclats de rire que la famille se souhaita un beau Noël et prit congé, il était bien tard et la route longue.

Personne ne s’embrassa, à cause des irruptions de boutons, ni se serra les mains. Faut dire, ils n'en avaient plus.

Mais le cœur y était et les adieux furent chaleureux, de toute façon il aurait été impoli de se plaindre pour si peu, et même si le repas était moins bon que l’année précédente un peu de courtoisie est indispensable à la bonne entente familiale.

Sur ce, je vous souhaite à tous un bon repas de Noël…   

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