Coming out
Cela fait près de trente ans que cela dure. Que je succombe régulièrement à cette pulsion coupable, à cette vilénie honteuse.
Chaque fois que je vois poindre les prémisses de cette bassesse qui me
traumatise, j’ai des sueurs froides, mes doigts tremblent. Ces doigts
qui rêvent de faire ce geste frénétique… J’essaie de repousser
l’échéance, j’abandonne en hâte mon occupation, je la délaisse parfois
pendant des jours.
Mais, lorsque je passe à côté de l’objet de mon tourment, mes yeux s’exorbitent tels ceux d’un junkie.
Je craque alors, je me confronte au danger qui me guette. Je me
retiens, je me raisonne, puis toutes mes résistances sautent et je
commets l’irréparable.
Cela ne me console pas de penser que des millions et des millions de
personnes souffrent de la même affliction, du même vice caché. C’est
bien là que le problème réside : tous, comme moi, gardent cette
blessure intérieure pour eux et ne peuvent donc s’en guérir.
Je décide donc, aujourd’hui, devant vous, d’avouer au grand jour ma
faute. Puisse mon coming out inciter celles et ceux parmi les
Paranoïaques qui souffrent en secret de ce mal à se libérer.
Oui, quand l’intrigue d’un polar, d’un thriller ou d’un roman
d’espionnage me passionne, je vais lire les dernières pages à l’avance.
Et vous ?