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Remue Méninge
3 octobre 2009

Super-héros à mi-temps

On n’a pas fini de parler de la crise financière et de ses conséquences dans tous les domaines. Bien sûr, par facilité, le feu des projecteurs s’est porté d’abord sur les plus faibles et les plus geignards : les Américains surendettés expulsés de chez eux dès potron-minet, les ouvriers licenciés qui menacent de faire sauter leur usine, Paris Hilton qui s’est cassé un ongle...

Mais il y a des afflictions dignes et silencieuses, qu’il serait ingrat d’oublier. Pensons, en particulier aux super-héros. Eux qui ont comblé notre enfance de rêves, est-il normal aujourd’hui de leur tourner le dos et de rire de leur gêne ?

Bref rappel historique : au temps de l’argent-roi et de la spéculation souriante, les super-héros, fatigués de leurs années d’exploits pour le bien de la communauté, ont cédé au chant des sirènes. Aveuglément confiants envers la loi du marché, ils ont confié leurs économies au fonds de pension de cet aigrefin de Lex Luthor et, alléchés par les premiers retours sur investissement, ont pris leur retraite pour goûter enfin au repos et à l’égoïsme.

Seulement, patatras ! Dès que la crise des subprimes a éclaté, les emprunts toxiques du sieur Lex ont pété au nez des cotisants. Notons que l’escroc, lui, s’en est bien sorti et qu’il se la coule douce aux Seychelles, dégustant de vieux Corton-Charlemagne en compagnie de ravissantes call-girls, qui fument joyeuses en dégrafant leurs pagnes, de la sinsemilla dans son brûle-gueule. (1)

Les pauvres super-héros, trop naïfs, se sont trouvés d’un coup tellement démunis qu’ils ont dû reprendre leurs anciennes missions, en les monnayant cependant. Mais, dans un contexte de restriction pour tous les salariés et, surtout, de perte des valeurs du rêve, ils emportent peu de succès. En effet, comment faire recette avec ses super-pouvoirs à une époque où n’importe quel idiot tout juste sorti de la crise acnéique passe à la télé 24/24 pendant trois mois, enfermé dans un « château » ? Comment faire valoir la défense de la veuve et l’orphelin, lorsque chacune détourne les yeux en passant devant plus pauvre que soi, serrant les fesses pour ne pas être le prochain locataire d’un carton ?

Et puis, avouons-le, les héros de nos jeunes années ont pris un sacré coup de vieux...

Ainsi, les anciennes étoiles au collant ultra-moulant doivent, pour survivre, exercer leur art à temps partiel, complétant leurs maigres revenus grâce à des emplois peu reluisants, vaguement inspirés de leur couverture du temps de leur gloire.

Ne soyez donc pas étonnés si vous vous faites « traiter » chez la manucure par un Wolverine honteux aux cheveux ébouriffés, pensez même à lui glisser discrètement un pourboire dans la patte, avant d’aller soigner vos mains déchiquetées.

Ne rabrouez pas le pauvre hère en uniforme rouge et bleu tout rapiécé qui vous propose en chuchotant des photos floues de la petite culotte de Britney Spears ou du dernier coma d’Amy Winehouse. Peter Parker n’a gardé de ses années dorées que son appareil photo et il est bien obligé pour survivre de se rabattre sur ce qui, reconnaissez-le, vous intéresse en fait beaucoup plus que des clichés d’un homme-araignée sauvant les passagers d’un bus...

N’ayez par contre aucune pitié pour Clark Kent ! La panade financière ne justifie pas de vendre son honneur de journaliste pour trente deniers. Comme si Le Figaro n’avait pas déjà assez de chroniqueurs économiques...

Soyez par contre charitables, Messieurs, quand vous croisez Wonder Woman au coin de votre rue. Bon, d’accord, elle est vieille et flasque maintenant mais, en fermant les yeux, vous vous rappellerez aisément qu’elle fut la cause de vos premiers émois adolescents...

En ces temps de galère, ne fermez pas votre cœur, redevenez le petit enfant qui rêvait devant les Marvel Comics !

Ou bien, donnez un bon coup de pied dans le ventre de ces super-héros en panade, descendus de leur piédestal. Après tout, qu’est-ce qu’ils étaient chiants avec leurs exploits toujours renouvelés, leur physique parfait et leur sens du triomphe faussement modeste...

Allez, je vais me revoir le générique des Watchmen, juste pour le plaisir :

“Your old road is
Rapidly agin'.
Please get out of the new one
If you can't lend your hand
For the times they are a-changin'.”

---
(1) il faudra qu’un jour j’arrête de saisir toutes les occasions pour citer du Thiéfaine...

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Remue Méninge
  • Remuer sans faire tourner la mayonnaise… Une envie de partager quelques réflexions sur le monde qui nous entoure, de titiller votre vision de la vie, d’échanger et débattre sur des sujets variés…sur un ton léger et décalé.
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